Opinion : « Le temple de la démocratie transformé en salle de cinéma » — Jean-Pierre Tshisuabantu

« Il est tristement regrettable que le temple de la démocratie se soit transformé aujourd’hui en une véritable salle de cinéma, où l’on projette sur des écrans géants, acquis grâce aux contributions volontaires des membres, les images de cadres et de militants dont le seul "crime" est de ne pas partager la pensée unique imposée par ceux qui ont choisi l’anarchie comme mode de gestion du parti », écrit Jean-Pierre Tshisuabantu, acteur politique congolais et doctorant à l’Université Pédagogique Nationale de Kinshasa.

Chercheur en sciences de l’éducation, Jean-Pierre Tshisuabantu n’a pas hésité à jeter un regard critique sur les maux qui rongent, ces derniers temps, la famille politique présidentielle, l’UDPS. Dans un message partagé sur ses réseaux sociaux et parvenu à InfoPlus.cd ce 16 août 2025, il affirme sans ambiguïté :
« Ce lieu (le siège de l’UDPS à Kinshasa), autrefois dédié au débat d’idées, à la tolérance et à la liberté d’expression, devient peu à peu un espace de lynchage moral, de mise en scène de règlements de comptes internes, au mépris total des principes démocratiques que nous prétendons défendre. »

Fidèle à sa posture de scientifique, Jean-Pierre Tshisuabantu ne s’est pas limité à fustiger. Il a, par ailleurs, invité à la responsabilité collective :
 « Une telle dérive appelle à la responsabilité et à la vigilance de tous. »

Les faits

Depuis près de cinq mois, l’UDPS vit une véritable tempête interne, alimentée par les frictions entre Augustin Kabuya et Déo Bizibu. Ces tensions fragilisent le parti présidentiel, pourtant censé incarner la stabilité et la cohésion.

À la tête du secrétariat général et assumant l’intérim de la présidence du parti, Augustin Kabuya multiplie les matinées et soirées politiques. Dans les grandes formations, ces cadres constituent un espace d’information et de formation des militants. Mais à l’UDPS, ils semblent désormais se muer en tribunaux populaires.

Plusieurs observateurs, tant nationaux qu’internationaux, rapportent que Kabuya aurait acquis, sur fonds collectés auprès des membres, un écran plasma destiné à projeter, lors de ces rencontres, les interventions et images de ceux qu’il désigne comme « ennemis » de l’intérieur.

La scène récente qui circule sur les réseaux sociaux illustre cette pratique : on y voit Kabuya, devant un parterre de militants, ordonner à la technique de diffuser une intervention du journaliste Péro Luwara. Une mise en scène qui alimente le climat d’intimidation au sein du parti.

Un appel à revenir aux fondamentaux

Face à cette dérive, Tshisuabantu exhorte l’UDPS à renouer avec ses fondamentaux. Le parti, rappelle-t-il, fut jadis une véritable école de formation politique, capable de produire des cadres compétents pour gérer la cité.

Un constat partagé par Tshivuadi Mukwa Lukusa, acteur politique congolais vivant à Lubumbashi et ancien membre de l’UDPS, qui affirme :
 « L’Union pour la Démocratie et le Progrès Social est une école qui, dans le temps, formait et éduquait des membres aptes et capables de gérer la cité. Dommage, elle est devenue un lieu de lynchage moral tout comme physique. »

L’UDPS, pilier historique de la démocratie congolaise, est aujourd’hui appelée à choisir : se laisser emporter dans la spirale de la personnalisation et de la mise en spectacle, ou redevenir ce qu’elle a longtemps incarné : un sanctuaire du débat d’idées.

La rédaction


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